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Il se cache parfois, derrière les murs aveugles des casernes de pompiers, des choses inattendues. Le béton épais de celle du boulevard Masséna, dans le 13e arrondissement de Paris – l’une des plus grandes d’Europe –, abrite ainsi en son sein une troupe d’acrobates, as de la voltige, athlètes hors pair, dont, on l’avoue, on ignorait l’existence.
On les a découverts début juillet sur un hippodrome de banlieue reconfiguré aux dimensions du Stade de France pour le besoin de répétitions (toutes placées secret-défense par les équipes de Paris 2024 pour ne pas déflorer les surprises du metteur en scène, Thomas Jolly). Ce jour-là, en forme de teasing, on nous avait dévoilé des miettes : deux cents acrobates de tout acabit sautaient, grimpaient, tournoyaient sur la scène. Et parmi eux, nos pompiers, militaires saltimbanques, reconnaissables à leurs survêtements réglementaires : la section de gymnastique des sapeurs-pompiers de Paris.
Le meneur de revue de cette troupe au nom prosaïque s’appelle Benjamin Guy. Enfant de Manosque, dans les Alpes-de-Haute-Provence, l’adjudant-chef en a gardé l’accent chantant, le sourire radieux, et dans les yeux, le bleu pâle des ciels d’été. Malgré cette semaine aux nuits passées au Stade de France, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), de 1 heure à 5 heures du matin pour répéter, il a ses traits qui ne sont pas marqués par la fatigue. « Avec le monde des circassiens, ce qui nous lie, c’est le goût des acrobaties, s’enthousiasme-t-il. Sur les répétitions c’est formidable, ça se donne des conseils, dans les deux sens. Eux voient notre rigueur, nous apprenons à leur contact à mieux porter. Dans le main à main… » Il fait une démonstration. « C’est qu’on n’est pas des professionnels. » Vraiment ? « Eux font de la gymnastique urbaine, ils peuvent courir sur mur, et faire un salto, façon Yamakasi. »
Ils sont vingt-huit, dont deux femmes (« Comme partout, on cherche à féminiser plus »), avec deux tiers de l’activité consacrée « au camion rouge » et un tiers « à mettre en scène artistiquement le métier de pompier de Paris », comme l’explique Benjamin Guy. Une vitrine pour ces dix-huit étages de pectoraux, de muscles et d’énergie vitale qui vaquent dans l’immeuble entre deux interventions d’urgence.
A l’image de l’iconique Joseph Maigrot (1900-1983), star de l’athlétisme français et pompier, dont une halle porte le nom à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), ou du capitaine Henri Deglane (1902-1975), ancien fort des Halles, entré en 1921 chez les sapeurs-pompiers, médaille d’or de lutte gréco-romaine aux Jeux olympiques (JO) de Paris en 1924, le sergent Damien Cely, 35 ans, a rejoint le corps après les JO de Londres, où il faisait partie de l’équipe de France de natation (plongeon). Le sergent-chef Damien Barré était, lui, spécialiste de la barre fixe qu’il a pratiquée à haut niveau (équipe de France juniors de gymnastique) avant de devenir soldat du feu. Benjamin Guy, lui, c’est l’acrobate. Au sol ou au trampoline.
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